Tout d’abord éclaircissons un point : nous ne sommes en aucune façon des adeptes de la mode « vintage ». Un peu dur de la comprenette, la plupart des journalistes ayant approché et écrit sur notre travail n’ont pas compris notre projet et ont donc échoué à le diffuser. C’est pourquoi il nous semble nécessaire de le redéfinir.

« Aubrac II » demeure une superbe randonneuse à un tarif exceptionnel. À cela deux raisons majeures qui, toutes deux, répondent à l’impératif qui présida au lancement de l’opération en 1999 : une volonté farouche d’inscrire la bicyclette dans le cadre d’une société humaine, ludique certes, mais aussi et surtout solidaire, écologique et durable, en un mot dans une vision réellement politique de la petite reine.

La première de ces raisons tient au fait que l’intégralité de notre travail s’effectue en total bénévolat. Nous n’hésitons jamais à investir de nombreuses heures dans la recherche de pièces ou dans le montage de nos machines s’il y va de l’intérêt de nos adhérents.

La seconde raison demeure plus technique, même si les choix effectués répondent, eux aussi, au projet intellectuel de base. La particularité d’Aubrac II réside dans son équipement. Ce dernier n’adopte pas les matériels considérés par le milieu comme le must des productions des équipementiers mondiaux (transmission 2×11, voire 1×12, systématisation des poignées de changements de vitesses, mécaniques voire même électriques, freins à disque, etc.).

Notre randonneuse se présente en 3×9 (voire 3×8), largement suffisant pour la pratique touristique, vitesses au cadre, freins cantilever sur jantes et selle en cuir Idéale 90, autour d’un cadre acier Reynolds 725. Cet équipement, qui peut apparaître rétrograde aux « yuppies » de la bicyclette, répond à un choix déterminé, affiché clairement par le comité directeur de l’association.

Composé de cyclos en total accord avec la nécessité écologique de l’époque, riches de dizaines de milliers de kilomètres cyclés, le comité directeur de la Confrérie a voulu équiper sa machine de périphériques capables d’assurer à ses utilisateurs une sécurité, une efficacité et une simplicité synonyme d’activité cycliste à vie pour un prix raisonnable. Cet ensemble de choix loin des élucubrations commerciales qui, greenwashing oblige, se sont emparées du milieu du cycle qui dérivent de plus en plus de la machine vélo porteuse de valeurs saines et humaines en un engin « kleenex », à renouveler chaque année pour répondre à la loi du marché, et développer une double compétition — techniquement par le phénomène de mode producteur de profits, et sportivement par la course dont l’apport à la société demeure discutable mais où, là-aussi, par la publicité, assure de nombreuses retombées financières.

Compte tenu des arguments ci-dessus, il demeure évident qu’Aubrac II se veut une machine hors-normes actuelles. Du fait de son classicisme, de sa longévité et de sa simplicité d’entretien, elle entend porter les vraies valeurs d’avenir dans un début de XXIe siècle au sein duquel, à n’en pas douter, le souci de l’environnement s’avère plus important que celui de la performance — ce qui ne l’empêche pas de demeurer une machine performante !

Patrick