– « Sur la route » mais sans Kerouac
Et le voilà reparti le routard infatigable qui sillonne la France tel un messager de la bonne nouvelle sixcentcinquantiste. C’est en direction d’Aix-en-Provence que le pèlerin Loïc a repris son sac à dos bourré de pneus qu’il compte distribuer lors du VSD à la Cézanne Cyclo Classic tels les petits pains sur la montagne. Mais dans ce noble but, l’homme a sollicité mon aide. Compte tenu du peu de bonne volonté de la SNCF lorsqu’il s’agit de transport de vélo, Loïc m’a demandé de lui prêter mon Singer, ce qui lui évite de traîner des journées entières dans des TER tortillards pour arriver à descendre sa randonneuse de sa Normandie lointaine. Lors de son passage chez nous, quelques jours avant son départ vers la célébration Bucco-Rhodanienne, nous vîmes toquer à notre porte un pauvre hère chargé comme un bourricot d’un énorme sac à dos bardé de surcroît de tringles et de pieds de vélo placés perpendiculaires au sens de la marche. Impressionné par tant de ferveur en faveur de la cause, nous avons hébergé le pauvre homme, et même roulé avec lui, le temps qu’arrive l’heure de son départ pour le lieu de pèlerinage. Nous avons compati… Comment aurait-il pu en être autrement face à tant de dons de soi. Et le soir dans la profondeur de notre lit douillet, nous avons pensé à ce véritable ascète, couché de l’autre côté de la cloison, dans un lit de fortune dont les tringles de fer du support mâchent toutes les nuits les os et les chairs. Nous l’avons imaginé traversant les espaces ferroviaires le dos courbé sous la charge. Puis une fois dans le train, à genoux près de son sac pour ne pas le perdre de vue, pour protéger sa précieuse cargaison, pour cause de manque de place et parce que, toujours humble, il avait cédé la dernière place libre à la vieille bourgeoise en tailleur Chanel qui, par pitié, lui avait jeté une piécette de 10 centimes. Ce que c’est quand même que le sacerdoce…
– Un peu de cuisine
Le jaja dans le vélo, c’est une histoire aussi vieille que la machine. Et même chez des couraillons qui n’ont rien à gagner sur le plan des pépettes, de la notoriété et encore moins sur le plan physique. Mais paraît-il que dans nos sociétés il faut être performant… Permettez-moi de vous conter une courte anecdote vécue il y a quelques jours. Après un repas au restau avec les copains, je me rendais au bar pour y faire remplir mon bidon. « Je vide ce qu’il reste ? » me demande le bistrotier. « Ben oui pourquoi ? » lui répondis-je surpris par l’incongruité de la question. « Parce qu’il y’en a qui ne veulent pas que je vide ce qu’il reste dans le récipient… » Sous-entendu, aussi clair que le ciel de cette journée magnifique : le liquide contient quelques ingrédients qui, sans être toutefois des mixtures exceptionnelles pour gonfler la performance sans apparaître à la détection, sont destinés à doper un minimum la mécanique humaine. Comme quoi la connerie ne dépend pas du niveau de pratique. Nous, nous sommes loin de ces pratiques coupables. Les rondelles de sauciflard sur une tranche de pain de campagne suffisent largement pour nous donner de l’énergie. Mais il y a quand même les gourmands. Ceux qui ne crachent pas sur la charcuterie de Lacaune mais ne peuvent renoncer à la douceur du sucre. Et bien voici une recette qui ravira tout le monde, goinfres de tous ordres, becs pointus et gourmands invétérés. Elle nous vient une nouvelle fois de cette riche Normandie, qui pourrait être le paradis sur Terre si la glace et les neiges éternelles n’en faisaient un terroir hostile à l’humain des paysages tempérés. Prenez du beurre, un bon morceau, c’est la base de la préparation. Faire fondre le beurre avec des petits morceaux de Mars. Égrenez menu dedans des flocons de chocolat « Crunch ». Mélangez le tout pour en faire des languettes oblongues d’une dizaine de centimètres et roulez-les directement sous les aisselles, puis mettez les au frigo. Les « Doubitchoux » de Dubrovnik sont prêts et, en terme d’énergie transmise, laisseront loin derrière toutes les barres chocolatées que vous pourriez acquérir dans le commerce. Si quelques détails de fabrication vous sont encore nécessaires pour confectionner vos propres réserves, écrivez-nous et nous vous orienterons vers le pâtissier-chocolatier responsable de la fabrication de ces originales merveilles.
– C’est plus de leur âge !
De retour du VSD non loin d’Aix-en-Provence, Loïc (Vaudry) et Yves (Etienne) ont fait escale à Sète. Le retour direct vers leurs pénates respectifs leur aurait trop coûté en termes de physique. Les pauvres nous sont arrivés éreintés par les kilomètres, les visites et les œuvres sociales sur le stand de la Confrérie. Ces deux rescapés n’ont pas même pu franchir le kilomètre et demi qui sépare la gare de notre domicile et ils ont du faire escale dans un bistrot pour prendre de l’énergie au fond d’un demi de bière. Non, ce genre d’opérations ne sont plus de leur âge, interrogés sur la façon dont s’est déroulé le week-end, ils ont été infoutus de nous dire le nombre de pneus vendus, c’est vous dire. Comme quoi il est un âge où seuls la belote et le jeu de domino convient à la distraction.
Non, je déconne ! Ils sont bien passés, mais très bon pied très bon œil, la socquette légère et une pâquerette à la commissure des lèvres. Ravis de leur participation et de l’ambiance de ce week-end spécial. Et si Yves est remonté fissa vers Bar-le-Duc où un rendez-vous urgent l’attendait, Loïc est resté chez nous pour participer ce samedi à l’inauguration du nouveau panneau du col des Confrères. Info en passant : sur le site, nous avons organisé une « tarte party », une idée qui, contrairement à beaucoup d’autres, ne nous vient pas des États-Unis du clown à la cravate rouge. Nous dégusterons les tartes confectionnées, à la fois avec les mains et avec amour, par les participants. La montée au col se fera avant le casse-croûte. Après, ça descend. Et c’est sûrement une bonne chose.
P.J.