
– Et une troisième couche
Ben il ne nous a pas attendu Antoine ! C’est tout seul et avec une seule main qu’il a réalisé le nouveau panneau du « col des Confrères ». Avec une seule main non pas parce qu’il prépare un numéro de cirque, mais simplement parce que, quand il a confectionné le panneau, il avait subi une greffe de peau sur l’autre et qu’avec la poupée qu’il avait autour il ne pouvait s’en servir. Donc, réalisation d’une main pour passer un temps qui, compte tenu de l’infirmité passagère, ne passait pas très vite. Mais qu’à cela ne tienne, le résultat reste parfaitement au niveau du panneau initial. Mieux, il est maintenant entouré d’un cadre métallique, parfaitement adapté qui le protégera encore mieux des intempéries et du vent de fada qui souffle sur cette crête à des vitesses pas raisonnables.
Nous avions prévu sur site une réunion des artisans-cyclos pour poser ensemble l’objet en question. Vu que notre Antoine s’en ai chargé tout seul, le chantier est bien sûr annulé. Mais reste peut-être à l’inaugurer ! Nous allons donc nous rapprocher des popotes pour tâter les confrères qui seraient tentés par l’idée. Il est vrai que pour certains des plus proches locaux, le coin ne présente pas de réelles possibilités de découvertes et que ceux-là ne collecteront pas ici des paysages ou des informations à enrichir profondément leurs boîtes à souvenirs. Mais bon, y’a pas que le vélo dans la vie ! Et un graillou sympa à l’ombre des blaques* et avec des copains, autour d’un verre de muscat avec sous les yeux la vallée de Pompignan, ça vaut peut-être aussi le coup de se déplacer.
* chênes verts
– De la SF 2025
Logique, comme chaque année la Confrérie était présente à la semaine fédérale. Et comme chaque année c’est Loïc qui s’y est collé. Il est vrai que ça ne lui coûte pas, l’homme est toujours prêt à donner du temps pour les bonnes causes. À l’heure où nous lui avons causé, il avait déjà vendu une trentaine de pneus et vécu une anecdote souriante. Une cyclote, peu au courant des us et coutumes dans le milieu, comme c’est le cas de beaucoup de gens qui pédalent plus pour suivre la mode que par goût, voulait acheter des pneus. Leur prix, c’est vrai, attire l’œil et les convoitises. Mais quand il lui fut annoncé qu’il fallait adhérer à la Confrérie pour les acquérir au prix annoncé, la dame est partie, non pas en courant mais comme si un berger malinois* avait défendu la table. Il est vrai que dans le cadre d’une semaine de vacances avec logements, boustifaille et « à côté » festifs, vingt euros c’est une somme (sic) !
Question terroir ? Ben, euh, de l’aveu même de notre représentant sur place, on ne peut pas dire que les paysages soient d’une diversité extrême. Ici, ce sont surtout les céréaliers qui prennent leur pied. Tant mieux pour eux, mais ce serait quand même aussi bien s’ils ne balançaient pas des mètres cube d’eau et de saloperies chimiques pour faire pousser leur paille à grains. Cela dit du point de vue du vélo, certes on ne fatigue pas, sauf s’il y a du vent, mais à part la morne plaine il n’y a pas grand-chose à découvrir. Si, pour les passionnés d’Histoire contemporaine, les sites et mémoriaux des camps d’internements de Pithiviers et Beaune-la-Rolande, de triste mémoire, où, après la rafle du Vel d’hiv, furent entassés des milliers de juifs en attente du départ vers Auschwitz et les camps d’extermination. Mais bon la fête fut belle quand même. Quant à la Confrérie, comme elle le devait elle occupa le terrain.
* chien d’origine belge dont la puissance et, dixit tous les spécialistes, l’intelligence survole de loin celle des autres races. Ce qui fait de lui le chien préféré des services de police et de douane. Donc, avis aux populations : à ne prendre ni pour un couillon, ni pour une lopette.
– Faut pas mollir !!!
Ceux qui vont chez le coiffeur (sic, pas comme moi donc…) connaissent le ciseau à dents qui permet d’éclaircir les chevelures trop épaisses. Et bien camarades, les temps présents sont du même acabit, ils éclaircissent, violemment, contre notre gré cette fois, nos rangs autant pédaleurs qu’épicuriens et philosophes. Comme le dit l’adage : « le temps est assassin » ! Et la génération qui nous fut contemporaine, à nous les anciens, se délite comme peau de chagrin et nous quittent les amis en nous abandonnant à nos regrets et à nos larmes. Restent les (un peu) plus jeunes. Mais même s’ils assurent la relève, celle-ci diffère un tant soit peu de nos façons de faire. Nos randonneuses, même si elles restent des outils au moins autant adaptées au cyclo-tourisme que les gravels de nos gamins, ne sont plus en « pole-position* » dans le choix des cyclos d’aujourd’hui. Marketing, projet différent… un peu des deux ma brave dame. Mais il faut s’y faire. Car dans notre tête de « petits vieux », quelle est la part d’objectivité et quelle est celle de la nostalgie ? Que ferions-nous à leur place ?
«J´ai compris tous les mots, j´ai bien compris, merci
Raisonnable et nouveau, c´est ainsi par ici
Que les choses ont changé, que les fleurs ont fané
Que le temps d´avant, c´était le temps d´avant » (JJ. Goldman/Céline Dion)
Il faut donc accepter ! Que leur vision du monde cyclo soit différente de la nôtre. Mais cela n’implique pas que nous devions lâcher le morceau. Un peu « has been » c’est sûr, mais est-ce une raison pour abandonner notre cause. Alors, haut les cœurs camarades. Et si l’armée (le mot est ici un peu exagéré) des randonneuses et des cyclos militants des temps anciens n’est plus de nos jours qu’une escouade fatiguée, serrons les rangs et finissons, oui, mais les armes à la main et la vaillance au cœur.
– 37,2° le matin… et 54 le soir !
Fait pas froid hein ! Pas vraiment une surprise. C’est pas d’hier qu’on nous prévient qu’il faudrait changer nos comportements. Mais bref, question vélo, comment faites-vous de votre côté ? Moi, je brave la nature. Et mon toubib qui « répoutègue* » en disant qu’à mon âge, bla bla, que par ces chaleurs il ne faut pas faire d’effort violent, re bla bla… Je m’en fous ! C’est pas raisonnable ? Je sais ! Et puis, des efforts violents, j’en fais pas, j’en ai jamais fait. Ou alors lors d’une rando longue, mais j’ai alors préparé la chose en fonction du relief, de la météo et de mon humeur. Comme vous camarades, je suis un cyclo, et je ne cherche en aucune façon la performance. Seulement voilà, pour en revenir à mon toubib, le mien et les autres, ils sont comme la totalité des ignares qui ne comprennent pas ce que l’on fait. Vous avez beau leur expliquer, en long, en large et en travers, comment vous pratiquez la bicyclette, rien à faire. Pour eux quand ils entendent vélo, ils voient tirage de bourre, pédalage de « tabarnau** » bras levés et coupe du vainqueur. Le fait que l’on puisse utiliser sa machine comme un moyen de voyager et de découvrir, la plupart du temps : ils arrivent pas à concevoir. Mais cette anecdote relatée, ce n’est pas là que je voulais en venir. Encore une fois c’est mon côté râleur chronique qui m’inspire.
Quel que soit le média que vous utilisez pour vous tenir au courant, vous constaterez que nos chers gouvernants mettent en place des choses, Bandes de glands !!! Après des dizaines d’années d’inertie, de choix favorisant la rentabilité en laissant se dégrader un climat qu’ils savaient en profonde mutation, voilà tout ce qu’ils trouvent à proposer : des annonces et des spots télévisés pour prévenir que vu qu’il fait très chaud, il faut se mettre au frais et boire beaucoup. « Et en plus ils nous prennent pour des c… » Comme si, mis à part quelques personnes âgées qui ont un minimum perdus le sens des réalités, nous ne sommes pas capables de comprendre ce minimum syndical, quand le corps t’informe que tu as une grosse soif. Voilà, braves gens, l’efficacité des politiques ! Pas d’inquiétude ! Les responsables sont au boulot ! Voilà, déjà, les premières décisions, les premiers actes réels pour ralentir une dégradation qui va poser des monceaux de problèmes mondiaux et quasiment insolubles.
* répoutèguer : se mettre en colère contre un sujet quelconque quand on est un minimum grognon de nature
** tabarnau (prononcer tabarnaou) : un fada à Marseille, une bouroune chez les rugbymen du sud-ouest. Un fonceur qui fonce sans réfléchir… souvent par manque de moyens de le faire.
P. J.